Téléchargement au Brésil : fin d'une époque
Voilà 6 ans que le site UmQueTenha (*) offrait aux amateurs du monde entier la possibilité de découvrir la diversité des musiques brésiliennes à travers une multitude de disques, en téléchargement libre et gratuit. Son auteur Fulano Sicrano a annoncé en octobre 2012 que son compte Rapidshare avait été autoritairement fermé, et que les contenus étaient désormais indisponibles. Triste nouvelle.
Le 9 octobre 2012, Umquetenha a été informé par Rapidshare que son compte était bloqué. Au même moment, il est devenu impossible de télécharger quoi que ce soit du gigantesque et précieux catalogue.
Triste nouvelle pour les amateurs du monde entier, dont l’accès à la musique brésilienne se limite à des piles de Michel Telo en hypermarché et à de vieux vinyls craquants… faute d’approvisionnement. Ou faute d’argent : qui peut posséder les 50 albums de Chico, les 60 disques de Caetano ? Et encore : où trouver les œuvres enterrées faute d’intérêt commercial, ou à cause d’une sombre embrouille entre rentiers ? Et tous ces joyaux qui n’ont jamais traversé l’Atlantique ? Où parcourir désormais la liste incroyable, classée par prénoms, de tous les artistes brésiliens ayant un jour gravé un sillon (*) ?
La fermeture du compte UQT sur Rapidshare a été décidée par l’hébergeur sous la pression des Majors et autres « ayant-droits ». Ce n’est pas un cas isolé (Toque Musical est ainsi tombé voilà six mois). Lula n’est plus président. Les autorités veulent faire du Brésil un pays du « Premier Monde », quitte à adopter des réglementations en décalage avec les réalités. Ana de Hollanda, le ministre de la culture qui a succédé à Gilberto Gil, n’est pas du tout sur la ligne de son prédécesseur qui prônait un internet « libre ». Son premier geste, à son intronisation, fut d’éliminer les licences Creative Commons du site de son ministère… tout un symbole.(*)
La disparition d’UmQueTenha est un très mauvais coup porté à toutes celles et ceux qui s’efforcent d’exporter la culture brésilienne à l’étranger. Peut-on espérer, en échange, un effort accru de diffusion internationale de la part des Majors et des officiels de Brasilia ? Tu me permettras d’en douter, affable lectrice, distingué lecteur.
(*) : Même au Brésil, les trois quarts des albums présentés par UmQueTenha ne sont plus en vente depuis longtemps.
(*) Politique du site : « Um Que Tenha est de caractère exclusivement culturel. Notre propos est de diffuser la musique brésilienne et les artistes brésiliens, et de défendre le plaisir de les écouter, sans qu’il n’en résulte une prime ou un bénéfice financier pour quiconque. Il est possible que tout le monde ne partage pas nos convictions. Si quelqu’un se sent offensé ou victime d’un préjudice, qu’il nous écrive, son point de vue sera évalué et le cas échéant l’article correspondant sera retiré. Si vous avez aimé ce que vous avez téléchargé, nous vous suggérons d’acheter l’album en magasin et sur des sites spécialisés – dans le cas où ces albums figurent encore au catalogue.»
A partir de 2011, les albums seront publiés au minimum trois ans après la date de leur lancement, sauf si l’artiste et/ou le producteur considérés acceptent une présentation anticipée.
(*) Précision : La sœur de Chico Buarque ne sera pas restée longtemps au ministère de la culture. Elle a été remplacée par Marta Suplicy le 11 septembre dernier.
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Bonjour,
Mauvaise nouvelle en effet (même si ce site m’avait, hélas, échappé… Trop tard pour en profiter).
Pour info, Ana de Hollanda n’est plus au gouvernement depuis un mois. -
Ce qui est le plus dommage c’est pour certains artistes qui postaient eux même leurs propres albums sur Umquetenha (Kiko Dinucci, Thiago França et autres). De toute façon la quasi totalité des artistes de la jeune musique indépendante brésilienne offre leurs albums en téléchargement (Criolo, Cicéro, Academia da Berlinda, Tulipa Ruiz et des centaines d’autres).
Sachant qu’Um que tenha, ne diffusait plus depuis quelques temps les albums en vente dès lors leur sorti mais après quelques années. Et certains albums brésiliens même pas parmi les plus obscurs sont non seulement introuvables sur amazon, mais également sur itunes si on a un compte français, un comble!
Mais c’est clairement aussi très dommage pour tous les classiques introuvables qui n’ont clairement plus de vie commerciale voir même plus d’ayant droits légitimes.
Le plus abusé que j’ai vu récemment était pour les rip de 78t non réédités en CD, et notamment la suppression d’une compilation de 78t introuvables uploadée par Receita de samba, des premiers enregistrements de Cartola qui ne sera restée en ligne que quelques heures avant d’être supprimé par mediafire!!!
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C’est effectivement une grosse perte. Et, comme le fait remarquer Boebis, de nombreux artistes soutenaient la démarche de Fulano « Machintruc » Sicrano. Comme Kiko Dinucci qui y voyait un acteur de la « démocratie digitale » et qui me déclarait l’an dernier :
« Les gens ici au Brésil ont un tel déficit d’éducation que le moyen de leur donner accès à la culture musicale par ce biais est très rapide. Par exemple, en mettant les disques en téléchargement, cela permettra par exemple à un gamin à l’autre bout du pays, dans le Natal, de le télécharger, connaître et étudier la musique. Je ne connais aucun programme du gouvernement qui fasse la même chose que Um Que Tenha. Ce qu’il fait est considéré comme criminel seulement parce qu’il enfreint la loi sur les droits d’auteur et qui est une loi vieille de deux cent ans et qui est complètement dépassée ».Et Thiago França de compléter :
« Le piratage est une question délicate. Car si tu analyses le texte de loi, Fulano, le type qui organise Um Que Tenha, n’est pas un pirate. Car il facilite seulement l’accès aux œuvres mais ne gagne rien, il n’y a pas de commerce là-dedans, rien de lucratif ».
Rien de lucratif, juste du partage. Comme tant d’autres, j’ai énormément appris sur la musique brésilienne grâce aux Loronix, Toque Musical et, évidemment, Um Que Tenha. A quand le retour sous une nouvelle forme ?
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Ca n’est pas par hasard que Hadopi cible en priorité les usagers des Torrents et du P2P. Le P2P est le seul moyen d’échanger entre particuliers, sans centralisation et sans possibilité de débranchage du jour au lendemain par un hébergeur qui prend peur. Le P2P est LE moyen pour les citoyens de garder la liberté de faire écouter à leurs amis les disques qu’ils aiment.
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Oui mais le P2P ne fonctionne pas pour les fichiers avec peu de personnes qui les partagent (la fameuse « longue traine »). Le direct download est super performant pour avoir des bons débits et des fichiers disponibles à toutes heures, sur tous les fuseaux horaires même pour des fichiers qui ne seront que téléchargés que par dizaines de personnes sur plusieurs années. En tout cas aujourd’hui, l’offre est infiniment supérieure en direct download qu’en P2P.
Et si Hadopi cible le P2P c’est simplement car elle n’a aucun moyen technique ou juridique de contrôler le direct download non ? 🙂
D’ailleurs, ce n’est pas un problème de partager en P2P des albums de musique brésiliennes en tout cas non distribués en France (soit 99%), il est certain qu’Hadopi ne les surveille pas.
Après je suis pas trop pessimiste, Um que tenha est dans le coma, ce n’est malheureusement pas le premier, il y a eu plusieurs comptes et blogs fermés notamment après la fermeture de megaupload, mais il en existe encore beaucoup d’autres, surtout pour la musique brésilienne où ce n’est pas ce qui manque… même si Um que tenha était le plus complet et avait une des meilleures sélections. Enfin… c’est bien dommage tout ça.
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Je constate avec mélancolie que la connerie gagne du terrain… et qu’un pays qu’on pensait différent ne rêve qu’à ressembler aux paradis de la rente et du fric facile.
Je vous laisse, je cours me suicider.
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Très dommage la disparition de UM QUE TENHA.
Je suis vraiment désolée. J’ai trouvé tant de merveilles sur ce site !
Merveilles que les auditeurs de Clube Brasil Radio peuvent heureusement en profiter. -
C’est moche pour le gars qui avait monté ce site et travaillé sans compter sans en tirer un sou.
Et je suis au désespoir parce que maintenant je ne sais plus où trouver tous ses disques brésiliens. Les autres sites présentent des albums soit très anciens soit très indy.
Sniff… 🙁
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