« Bidonville » a 50 ans
L’album Bidonville de Claude Nougaro est paru en juin 1966 chez Philips. Adaptée de l’afro-samba ‘Berimbau’ de Baden-Powell et Vinicius de Moraes sortie l’année précédente, la chanson titre se situe parmi les meilleures de notre Anthologie de la samba française. Ecrite à une époque où Nanterre et Noisy le Grand comptait des bidonvilles géants, elle résonne dans ma tête chaque fois qu’une télévision rapporte des images des camps de migrants de Calais.
Depuis le démantèlement du camp de Sangatte en 2002 et la signature des accords du Touquet par le ministre de l’intérieur de l’époque (un certain Nicolas Sarkozy) Calais renferme un bidonville où s’amassent les candidats à l’émigration en Grande-Bretagne. Dans une zone Seveso, dans la boue, régulièrement déplacés pour revenir ensuite au plus près de la frontière, Afhgans, Erythréens, Syriens, Irakiens vivent dans la plus grande misère, gardés par la Police française qui fait office de supplétifs pour nos chers amis Britanniques. Près de Dunkerque, Tétéghem et Grande-Synthe connaissent la même situation. Les associations et les bonnes volontés font ce qu’elles peuvent. Au plus près de cette détresse humaine, les habitants sont partagés entre la peine et la colère – immobilier en chute libre, effondrement économique, sentiment d’insécurité. Et depuis 2003, on tourne en rond au fil des coups de menton de nos politiques, de l’hypocrisie de nos voisins, et de la lâcheté européenne. On dirait qu’il n’y a que des mauvaises solutions. Jusqu’à quand ?
On ne tentera pas une comparaison entre cette situation censément provisoire – et terriblement durable – avec le système des favelas brésilienne. Ne serait-ce que parce que ces malheureux n’ont aucune intention de faire leur vie dans notre pays, quand les habitants des favelas sont pour la plupart des travailleurs pauvres brésiliens. Mais, sous la coupe des trafiquants de drogue là-bas, des trafiquants de chair humaine (les passeurs) ici, les bidonvilles de tous les pays partagent la même vie de misère, de violence et d’agressions sexuelles.
Tout ça est proprement dégueulasse. Ecoutons Claude Nougaro.
La version d’origine, enregistrée ici lors des célèbres concerts de La Fusa, à Buenos Aires par Vinicius, Toquinho, et la bande. Il n’y est pas question de bidonville – plutôt une réflexion poétique sur l’homme, l’amour et la capoeira.
Paroles de Berimbau et traduction française ici.
Photo : merci aux Dernières Nouvelles d’Alsace
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