Le pont sur l’Oiapoque et ses contradictions
Le pont qui va relier la France au Brésil sera bientôt une réalité. Il ne manque plus grand chose pour passer à pied sec de l’Amapa à la Guyane. 400 personnes s’y relaient sept jours sur sept. Naturellement, les travaux ont pris du retard. Prévue initialement pour fin 2010, l’inauguration est désormais pour septembre 2011. Encore ne parle t-on pas de l’ouverture au trafic.
C’est sympa un pont, surtout quand il nous relie à un pays ami. Le problème c’est que le projet, né d’un accord entre Jacques Chirac et Fernando Henrique Cardoso signé en 1997, n’a pas franchement fait l’objet d’une étude économique préalable. Les habitants n’ont pas été consultés. Françoise Grenand, chercheur du CNRS qui travaille sur place, parle de « fantasme de diplomate ». La Guyane n’a rien à vendre, et demeure encore et toujours le département abandonné, celui auquel la métropole ne s’est jamais intéressé autrement que pour y entrainer ses légionnaires, punir ses fonctionnaires ou faire décoller ses fusées. L’état des finances françaises ne laisse pas espérer de changement. De son côté, le Brésil est en plein boom, et l’Amapa en rapide développement. La question qui demeure sans réponse : un pont pour quoi faire ?
Seule certitude : la présence de 60 policiers et douaniers. Leurs casemates sont déjà prêtes. Les brésiliens habitués à la débrouille découvriront les joies de la politique sécuritaire française et des réglementations européennes… Auront-ils longtemps envie de parcourir les 600 kilomètres qui séparent Macapa de Cayenne ?
Autre question en suspens, justement : la route. Bien joli d’avoir un pont, encore faut-il qu’il y ait des chemins qui y mènent. Côté français, la RN2 est au point, même si on ne sait pas trop ce qu’elle deviendra si le trafic des camions se développe. Côté brésilien, pour arriver à la capitale Macapa, demeurent plusieurs centaines de kilomètres de piste de latérite impraticables à la saison des pluies…
Pour en savoir plus, je vous recommande ces lectures :
Le site de la DDE, sur lequel vous apprendrez tout à propos du chantier lui-même :
http://www.guyane.developpement-durable.gouv.fr/rubrique.php3?id_rubrique=17
Les travaux de terrassement ont mis à jour un site archéologique amérindien, dont des puits funéraires contenant des urnes peintes. Découvrez les sur le site de l’INRAP :
http://www.guyane.developpement-durable.gouv.fr/article.php3?id_article=352
Et surtout un passionnant reportage réalisé en 2010 par Sophie Bécherel et diffusé en podcast par France Inter : Oyapock, drôle d’endroit pour un pont :
http://sites.radiofrance.fr/play_aod.php?BR=4934&BD=12122010
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