Le nouveau film de Breno Silveira célèbre Luiz Gonzaga
Luiz Gonzaga, le Roi du Baião, est une figure tutellaire du Nordeste aux côtés de Lampião et de Padre Cicero. Ce musicien génial, qui a réinventé le forró au cours de ses soixante ans de carrière, fait l’objet d’un biopic présenté au Festival du cinéma brésilien de Paris 2013. Le film m’a beaucoup plu, et son réalisateur Breno Silveira a accepté une interview. Trop dure la vie !
Je retrouve Breno Silveira dans un hotel cozy de Saint Germain des Prés, à deux pas du cinéma l’Arlequin (rue de Rennes) où se déroule actuellement le Festival du cinéma brésilien de Paris. Mais aussi non loin des anciens locaux de l’école Louis Lumière, encore située rue de Vaugirard quand Breno y compléta ses études.
BossaNovaBrasil : C’est important pour toi de revenir à Paris, dans le quartier de ton ancienne école ?
Breno Silveira : Oui, même si le plus important c’est moins l’école que de respirer le cinéma comme je l’ai fait pendant ces deux merveilleuses années 85-86, quand j’étudiais ici (Breno Solveira a commencé comme directeur de la photographie, NDLR). Au cours de ces deux ans, j’ai vu plus de 200 films. Je reviens régulièrement à Paris, toujours pour cette atmosphère.
BNB : Après le succès en 2005 de Dois Filhos de Francisco, qui racontait l’histoire du duo star de la musique sertaneja, Zezé di Camargo e Luciano, voilà que tu présentes à paris une biographie de Luiz Gonzaga. Gonzaga de Pai pra Filho (Gonzaga de père en fils) fait déjà un gros succès au Brésil. On dirait que la musique brésilienne te porte chance ?
Breno Silveira : C’est vrai que les Fils de Francisco a fait un tabac, avec plus de six millions d’entrées au Brésil. Je sais que tu n’es pas un fan de musique sertaneja (c’est bien vrai), mais chez nous beaucoup de gens l’aiment. Et Caetano, Maria Bethania, Ney Matogrosso, qui étaient un peu dubitatifs au départ, ont finalement accepté d’y chanter des musiques de Zezé et Luciano.
« Je pensais d’abord devenir musicien »
La musique est le plus bel art du Brésil. Bien plus que le cinéma – en tous cas pour l’instant ! Alors, et aussi parce que je joue de la guitare et que je pensais d’abord devenir musicien, j’aime associer musique et cinéma…
BNB : Comment est venu l’idée de faire un film sur Luiz Gonzaga, o Rei do Baião, et sur son fils Gonzaguinha ?
Breno Silveira : Mon grand père est Pernambucano. Là-haut, dans le Nordeste, on apprend les chansons de Gonzagão dès l’école primaire, on les entend à la radio, et 15 ans après sa disparition c’est comme s’il était toujours vivant. Pareil à Rio avec Gonzaguinha, dont certaines chansons sont régulièrement reprises par les plus grands noms de la musique brésilienne.
Le personnage central du film, c’est Luiz Gonzaga. Un musicien extraordinaire, et à la fois si simple, si naïf, totalement généreux de lui-même. Dans les années de sa gloire la RCA n’arrivait même pas à produire assez vite les vinyls, et les magasins étaient tout le temps en rupture de stock ! Mais il était capable de jouer sur la terrasse de la salle de concert, abandonnant la scène et ses spectateurs payants pour « son peuple », ceux qui n’avaient pas pu entrer. C’est une scène forte du film.
« 70 cassettes de dialogue intime entre Luiz Gonzaga et son fils »
Gonzagão était aussi un homme que l’amour de la musique et les événements avaient détaché de son fils unique. Quand on m’a apporté il y a sept ans une mini K7 qui contenait un dialogue sur le vif entre Luiz et (son fils) Gonzaguinha, je n’ai pas pu résister. J’ai écouté le contenu des 69 autres et j’ai décidé de m’y mettre. Oui, il y avait 70 mini-cassettes ! Parti retrouver son père dans le Sertão, Gonzaguinha avait entrepris de le faire parler, de sa vie et de sa propre mère, lors d’une entreprise de psychothérapie père et fils aussi extraordinaire qu’improvisée.
BNB : Comment trouver l’acteur pour tenir un tel rôle ?
5000 candidats pour le rôle de Luiz Gonzaga
BS : J’ai mis deux ans pour trouver mon Gonzagão. Au bout de six mois, j’ai bien failli tout laisser tomber. Et puis j’ai lancé un appel dans les radios du Nordeste. Cinq mille personnes se sont portées candidates ! Des 5000, la production en a sélectionné 100, puis j’en ai gardé 40… et nous avons fait passer des essais à dix d’entre eux. Cinq sont restés avec un coach à Rio… et j’en ai retenu deux, pour les deux âges du film.
Chambinho do Acordeon est un musicien nordestin. Il a le sourire, la sympathie instantanée, la naïveté, la gentillesse native de Luiz Gonzaga. Bon, je ne dirais pas que ça ait été facile de le faire devenir acteur… j’ai même connu de grands moments de doute. Mais le résultat est là, et je suis très heureux.
Pour choisir mon Gonzaguinha, ce fut tout le contraire. Le deuxième candidat que j’ai vu est arrivé dans la pièce avec une guitare sous le bras. C’était Júlio Andrade. Il a voulu chanter avant toute chose. La démarche, le visage, le regard, la voix… incroyable, c’était Gonzaguinha ! J’ai arrêté le casting, et je ne l’ai pas regretté.
BNB : Jamais deux sans trois, non ? Quel sera le sujet de ta prochaine biographie de musicien ? Le Brésil ne manque pas de musiciens mythiques il me semble ? João Gilberto, par exemple ?
BS : Au Brésil, on ne peut pas tourner de biographies non authorisées. Cela nécessite de recueillir l’accord des familles, ce qui peut être assez compliqué… Il est encore trop tôt pour en parler (mais j’ai l’impression qu’il a des idées plein la tête, NDLR).
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Vous pouvez voir jusqu’à dimanche Gonzaga, de Pai pra Filho (sous-titres français) au cinéma l’Arlequin, rue de Rennes à Paris, dans le cadre du Festival du cinéma brésilien de Paris. Une biographie, émouvante mais sans pathos exagéré, des anecdotes parfaitement intégrées au scénario, et beaucoup, beaucoup de musique. Recommandé !
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J’aime beaucoup la question subtilement amenée sur le biopic de Joao Gilberto !! Ah ! le rêve cinématographique que ce pourrait être !!
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oi et comment fait on pour voir ce film si on est pas parisien ???
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pour Joana : cherche un peu sur YouTube…
Commentaires