Mort de João Gilberto : la bossa nova en deuil
Je reprends exceptionnellement la plume sur BossaNovaBrasil pour annoncer la mort du chanteur, guitariste et compositeur brésilien João Gilberto à l’âge de 88 ans. La musique des anges va trouver un nouveau rythme.
Né en 1931 dans l’intérieur de l’état de Bahia, à Juazeiro, João Gilberto présentait toutes les caractéristiques du génie légendaire. Très vite décidé à faire une grande carrière musicale, il tente sa chance comme chanteur dans un groupe carioca des années 50, Os Garotos da Lua, mais cette première période tourne court. Il retourne chez ses parents, qui le croient fou. João a juste la tête ailleurs. Il se cherche. Et en cherchant son style, il va réinventer la samba, avec une battue nouvelle sur sa guitare et un style de chant fondateur. Et caractériser pour toujours cette nouvelle vague, cette bossa nova, aux côtés de Tom Jobim et bientôt suivi par beaucoup d’autres.
Joao Gilberto n’a composé en tout et pour tout que douze chansons, parmi lesquelles Bim Bom, Hô-Bá-Lá-Lá, Undiu ou Você Esteve Com Meu Bem. Ses apparitions publiques étaient plus que rares, et il a finalement peu enregistré pour une si longue carrière. Mais son jeu de guitare, sa voix douce et l’extraordinaire décalage qu’il savait donner au chant par rapport à l’accompagnement demeurent inoubliables.
Le perfectionnisme de João était bien connu, et souvent moqué. C’est vrai qu’on l’a vu quitter la scène pour cause de climatisation bruyante, de mauvaise balance, de bruits dans le public… il ne fallait pas y voir de la prétention. L’homme était charmant, bavard, tendre, mais il mettait tellement de lui-même dans ses interprétations qu’il ne supportait pas ces petites contrariétés. Depuis une dizaine d’années, João vivait très discrètement dans un immeuble de Leblon, à Rio de Janeiro, refusant toute interview. Son dernier concert remontait à 2008, pour les 50 ans de la bossa nova – salle comble et énorme émotion.
João Gilberto avait du annuler ses trois concerts de juin 2010 aux Etats-Unis. On avait cru à une facétie, comme d’avoir négligé de demander un visa. En 2011 la tentative d’organiser une série de concerts pour célébrer ses 80 ans avait tourné court : toutes les représentations avaient à nouveau été annulées. Les raisons médicales évoquées avaient suscité bien des doutes et des rumeurs. Mais il s’agissait malheureusement d’une réalité. Le Magicien des harmonies était très affaibli, jusqu’à s’éteindre hier. L’inventeur du rythme de la bossa nova disparaît, en laissant une œuvre sans concession qui a inspiré deux générations de musiciens du monde entier.
C’est avec Aguas de Março que s’ouvrait mon premier disque de João Gilberto, l’album « blanc » sorti en 1973. C’est cette interprétation, éternelle, que je vous propose d’écouter aujourd’hui pour saluer son départ le 16 juillet 2019.
Clip audio : Le lecteur Adobe Flash (version 9 ou plus) est nécessaire pour la lecture de ce clip audio. Téléchargez la dernière version ici. Vous devez aussi avoir JavaScript activé dans votre navigateur.
Retrouvez ici une série d’articles consacrés à João Gilberto.
Vous aimez ? Parlez-en à vos amis !
Article précédent
« Bidonville » a 50 ans
Article suivant
This is the most recent story.
-
Merci Thierry pour cet hommage. Joao Gilberto était un pilier essentiel de la bossa. Quiconque à joué de la bossa sur une guitare peur comprendre son talent unique pour poser des accords sophistiqués, parfois juste à côté du tempo. Le bonhomme n’avait pas le meilleur caractère au monde mais on s’en foutait.
Um abraço
Commentaires