Nous avons eu l’occasion de parcourir de nombreux pays au cours de nos voyages, mais certains lieux marquent l’âme plus profondément que d’autres. Le sanctuaire de Fátima au Portugal figure parmi ces destinations extraordinaires, où l’histoire spirituelle se mélange à la culture locale. Cette petite ville, située entre Lisbonne et Porto, abrite l’un des plus importants lieux de pèlerinage catholique au monde suite aux apparitions mariales de 1917.
Les apparitions de 1917 et leurs témoins privilégiés
Le 13 mai 1917, trois jeunes bergers transforment à jamais l’histoire de ce petit village portugais. Lúcia dos Santos, âgée de 10 ans, accompagnée de ses cousins Francisco et Jacinta Marto, âgés respectivement de 9 et 7 ans, affirment avoir vu une Dame vêtue de blanc près du hameau d’Aljustrel. Cette figure mystérieuse leur demande de réciter quotidiennement le chapelet pour obtenir la paix mondiale et la fin de la Grande Guerre.
Les apparitions se succèdent chaque 13 du mois jusqu’en octobre 1917, attirant des foules croissantes. En juin, 50 personnes accompagnent les enfants. En juillet, plus de 2 000 curieux se rassemblent autour du chêne des apparitions. Les enfants demeurent les seuls témoins directs de ces visions, même si quelques observateurs rapportent la présence d’un petit nuage blanc au-dessus du lieu.
Les autorités civiles tentent d’étouffer l’affaire en août 1917, emprisonnant les trois bergers à Ourèm. Malgré cette intervention, plus de 5 000 personnes se pressent sur le site, observant des phénomènes météorologiques inexpliqués. En septembre, la foule atteint 10 000 personnes avant l’apothéose du 13 octobre.
| Date | Nombre de témoins | Phénomènes observés |
|---|---|---|
| 13 mai 1917 | 3 enfants | Première apparition |
| 13 juin 1917 | 50 personnes | Seuls les enfants voient |
| 13 juillet 1917 | 2 000 personnes | Petit nuage blanc |
| 13 octobre 1917 | 50 000 personnes | Miracle du soleil |
Le miracle du soleil et ses répercussions
Le 13 octobre 1917 marque l’événement le plus spectaculaire des apparitions de Fátima. Plus de 50 000 personnes affluent vers le site malgré la pluie battante. Lúcia demande à la foule de fermer les parapluies, geste qui paraît insensé sous ces trombes d’eau. Soudain, les nuages se dissipent et le soleil apparaît.
Les témoins décrivent alors des phénomènes extraordinaires : le soleil change de couleur, passant du rose au bleu, puis au vert. L’astre semble tourner sur lui-même avant de plonger vers la terre, provoquant la panique, puis reprend sa position normale. Ces observations font l’objet de nombreux articles de presse, souvent critiques ou ironiques.
L’Église catholique ouvre une enquête approfondie sur ces événements. Les autorités civiles interdisent temporairement les pèlerinages à Fátima, mais la ferveur populaire persiste. Le 13 octobre 1930, l’évêque de Leiria reconnaît officiellement les apparitions et approuve le culte de Notre-Dame de Fátima.

Les trois secrets révélés par la Vierge Marie
Lors de l’apparition du 13 juillet 1917, la Vierge confie aux trois bergers trois parties d’un même secret, leur demandant de ne pas les révéler immédiatement. Ces révélations alimenteront fantasmes et spéculations pendant des décennies.
Lúcia dévoile les deux premières parties en 1941 dans ses mémoires. La première partie concerne une vision terrifiante de l’enfer et un appel à la dévotion au Cœur immaculé de Marie pour sauver les âmes des pécheurs. Cette révélation s’accompagne d’une promesse de paix si les demandes divines sont respectées.
La deuxième partie évoque la Russie et sa nécessaire consécration au Cœur immaculé de Marie. Elle prédit que sans cette consécration, la Russie répandra ses erreurs dans le monde, provoquant guerres et persécutions. Cette prophétie résonne particulièrement dans le contexte de la révolution bolchevique de 1917.
La troisième partie reste secrète jusqu’en 2000. Rédigée par Lúcia en 1944, cette lettre est transmise au Vatican en 1957 avec l’engagement de ne pas l’ouvrir avant 1960. Cette vision allégorique décrit un pape gravissant une montagne escarpée vers une grande croix, traversant une ville en ruines, avant d’être abattu par des soldats. Cette prophétie suscite encore aujourd’hui de nombreuses controverses sur son interprétation et son accomplissement.
- Vision de l’enfer et appel à la dévotion
- Prophétie sur la Russie et la paix mondiale
- Vision du martyre du pape et du clergé
Le destin des trois bergers et l’héritage spirituel
Le sort des trois enfants témoins illustre la dimension prophétique des apparitions. Francisco et Jacinta Marto décèdent jeunes, comme l’avait annoncé la Vierge lors de la deuxième apparition. Tous deux sont emportés par la grippe espagnole : Francisco meurt le 4 avril 1919 à 10 ans, Jacinta le 20 février 1920 à 9 ans après de longues souffrances.
Lúcia dos Santos, seule à avoir dialogué directement avec la Vierge, vit jusqu’à 97 ans. Elle entre en religion en 1921, prononçant ses vœux en 1934 sous le nom de sœur Maria das Dores. Elle passe ses dernières années au Carmel de Coimbra, décédant en 2005. Le pape François canonise Francisco et Jacinta le 13 mai 2017, lors du centenaire des apparitions.
Aujourd’hui, Fátima accueille plus de 5 millions de pèlerins annuellement. Le sanctuaire comprend plusieurs édifices remarquables : la basilique Notre-Dame du Rosaire, consacrée en 1953, et la basilique de la Sainte-Trinité, inaugurée en 2007, quatrième plus grande église catholique mondiale. Ces constructions témoignent de l’importance spirituelle du lieu, où se mélangent architecture moderne et tradition religieuse, rappelant les styles architecturaux typiques du Portugal.
L’influence de Fátima dépasse largement les frontières religieuses. La plupart des foyers portugais possèdent un objet lié au sanctuaire : médaille, figurine ou pendentif. Cette dévotion populaire s’exprime également dans la langue, où certaines expressions religieuses résonnent avec la saudade portugaise, ce sentiment unique qui caractérise l’âme lusitanienne. Après une journée de visite, nous comprenons mieux pourquoi les pèlerins terminent souvent leur prière par un simple bonne nuit en portugais, témoignage de cette spiritualité apaisante. Cette expérience nous rappelle le mystérieux sentiment portugais qui unit foi et mélancolie dans une même émotion transcendante.














